Le Trait d’Union, journal d’information du Syndicat Unifié-Unsa, est adressé chaque trimestre au domicile des seuls adhérents actifs et retraités. Découvrez ci-après un article de la rubrique “VU POUR VOUS”…

Le « cinoche » épée de Damoclès ?

Quoi de plus banal en France qu’une usine qui ferme ? Et quand il s’agit d’une usine de papier, « la messe est dite » pensez-vous… D’autres n’ont pas accepté ce qu’on leur présentait comme une évidence, et leur lutte a fait l’objet d’un film sorti le 3 janvier 2024 « L’usine, le bon, la brute et le truand ».

La réalisatrice de ce film documentaire, Marianne Lère-Lafitte, a suivi caméra en main durant plus d’un an, le combat d’un trio d’élus du personnel refusant que leur usine centenaire disparaisse, après la décision de fermeture prise par son propriétaire finlandais dès 2019.

CATHÉDRALE INDUSTRIELLE

Déambuler, dans un silence assourdissant, au milieu d’imposantes machines à l’arrêt, dans ce monumental bâtiment de tôle et de béton, c’est un peu comme visiter un lieu de culte quand les fidèles l’ont quitté. Les lieux demeurent habités, c’est sûr, par cette activité qui les faisait vivre depuis 1928, année de création.

Chapelle Darblay (près de Rouen) était la seule usine en France à fabriquer du papier journal 100% recyclé. Après la décision étonnante de la fermer, il fut même envisagé de démanteler les installations pour en faire un site de production d’hydrogène…

Si ce n’est pour de sombres questions financières et de rentabilité à court terme, comment a-t-on pu en 2020 tirer un trait sur une papeterie industrielle qui employait 217 salariés et recyclait 480 000 tonnes de papier par an, soit l’équivalent de ce que jettent 24 millions d’habitants.

LE BON, LA BRUTE ET LE TRUAND

C’est une histoire dans le style David contre Goliath, quand 3 représentants du personnel, issus d’horizons divers, décident d’unir leurs efforts et de ne jamais rien lâcher… Ce trio, c’est le délégué CGT, massif mais à l’esprit affuté (la brute), le secrétaire du CSE plus fluet mais tout aussi vif d’esprit (le bon), ouvrier incarnant la troisième génération familiale sur le site, et un cadre travaillant dans les bureaux (le truand). Arborant fièrement leurs sobriquets, ils ont décidé de combiner leur culture et leurs différences pour faire prospérer l’intelligence collective sur fond de fraternité professionnelle.

Cette alliance de fortune, improbable aux yeux des dirigeants puisque certains vivaient au « Kremlin » (les locaux sociaux) et d’autres à « Versailles » (les bureaux), a fait des miracles. Et qu’on les surnomme les « 3 connards » n’a fait que renforcer leur détermination.

 

LA VICTOIRE SYNDICALE EST POSSIBLE

Ayant conscience de leurs limites, ils ont parfaitement su s’entourer, tirer les bonnes sonnettes, identifier les compétences et mobiliser les forces : domaine syndical, industriel, politique et environnemental, ils n’ont négligé aucune opportunité, jusqu’au film dont ils font un outil, une sorte d’épée de Damoclès qui force les politiques et les industriels à honorer les promesses qu’ils sont prompts à faire…

En 2026 (peut-être 2027) le site devrait redémarrer si l’on en croit l’article publié par Médiapart…

Cet article est signé par Bernard CHARRIER
ancien Secrétaire général Syndicat Unifié-Unsa

Pour visualiser la bande annonce du film CLIQUEZ ICI